La présidentielle USA 2008 par 20minutes.fr

BREVES DE CAMPAGNE – Obama et «l’amertume» des petits villages, Hillary Clinton et les guns

Le calme avant la tempête? A dix jours d’une primaire décisive en Pennsylvanie, la semaine écoulée n’a été marquée que par la «polémique» (avec un tout petit p) autour de la remarque d’Obama sur les villages reculés.

La gaffe d’Obama. Qu’a donc dit le sénateur de l’Illinois pour se faire attaquer sur ses deux flancs par Hillary Clinton et John McCain? Lors d’un meeting avec des donateurs potentiels dimanche dernier, il a abordé le sujet des électeurs des petits villages de Pennsylvanie ou de l’Indiana. Et de déclarer: après deux mandats de Bush et de crise, «ce n’est pas surprenant qu’ils soient amers, se raccrochant à leurs fusils ou leur religion ou à leur antipathie des personnes différentes». Comme ils disent ici, not his best move. Car aussitôt,  Hillary et McCain lui sont tombés dessus, l’accusant «d’élitisme» et arguant qu’un président ne pouvait pas prétendre rassembler tout le monde et regarder certaines personnes de haut. De quoi pousser Obama à regretter «un choix maladroit» dans ses mots. Il faudra voir dans les sondages sortis des urnes le 22 avril l’impact de cette «maladresse».

L’équipe Clinton perd sa tête

La boulette de trop. Mark Penn, stratège en chef de la campagne d’Hillary Clinton vient d’être poussé à la démission, suite à «l’affaire» de sa rencontre avec l’ambassadeur colombien. Retour sur un feuilleton un peu compliqué.

Tout commence vendredi. Le Wall Street journal révèle que Mark Penn a rencontré, la semaine dernière, l’ambassadeur colombien aux Etats-Unis pour discuter d’un accord commercial bilatéral entre les deux pays. Un accord que la Colombie aimerait bien voir être ratifié par le congrès américain cette année. Sauf qu’Hillary Clinton s’y est toujours dit opposée. Que fabriquait donc Mark Penn?

Un ancien président, ça gagne énormément

Après avoir traîné des pieds un moment, Hillary a donc fini vendredi par rendre publiques les déclarations de revenus de son couple pour les années 2000-2007 (au moment où son stratège en chef, Mark Penn, se trouve en position inconfortable après avoir rencontré deux ambassadeurs colombiens pour discuter d’un accord commercial auquel la candidate s’est toujours dit opposée). D’après les documents, le couple Clinton a amassé la coquette somme de 109 millions de dollars en huit années post- présidence. Voici ce qu’il faut en retenir:

Memphis blues again

Dans les rues de Memphis, pas très loin du Lorraine Hotel où fut assassiné Martin Luther King le 4 avril 1968, entre la statue d’Elvis et les eaux ocres du Mississippi, on peut croiser Marvin Louis Brooker, un sans-abri afro-américain qui distribue contre une poignée de dollars une brochure photocopiée de quinze pages appelée «La signification complète de Martin Luther King Jr»
Dans le texte un peu touffu de ce prêcheur de rue, on peut lire ceci : «Que se serait-il passé si Martin Luther King n’avait jamais été assassiné ? A quoi auraient ressemblé les années 1970 ? Est-ce que Colin Powell aurait été nommé comme le premier secrétaire d’Etat noir des Etats-Unis ? Condoleezza Rice aurait-elle jamais été nommée en tant que première femme noire secrétaire d’Etat ?»
Je me demande à quoi pense Marvin Louis Brooker dans les rues de memphis aujourd'hui.
Pour les 40 ans de sa mort, Al Vorspan, un compagnon de route du révérend dans la lutte pour les droits civiques revient dans 20 Minutes sur l'héritage du révérend King.

Gilles Bouvaist, à New York

The woman (Deux ou trois choses que je sais d'Hillary Clinton)

On peut sans doute reprocher beaucoup de choses à Hillary Clinton, mais n'allons pas trop vite en besogne quand même… Et même si c'est bizarre de répondre au post d'un autre blogger sur son propre blog, allons-y.

Tout d'abord, "la mort inexpliquée" de Vince (et non John) Foster,  un conseiller de la Maison Blanche retrouvé mort en 1993, et dire qu'il s'agit "probablement [de] son amant" relève de la plus pure vast right wing conspiracy (theory), l'expression employée par Clinton elle-même pour désigner les théories et rumeurs multiples propagées par des journaux ultraconservateurs comme The American Spectator, eux-mêmes financés par des idéologues comme le milliardaire Richard Melon Scaife, déterminés à détruire la présidence Clinton à tout prix (ça avait même un nom : The Arkansas project).  Rappelons qu'au bout de trois ans d'enquête, Kenneth Starr, pas vraiment un pro-Clinton, a conclu à un suicide. Qu'Hillary Clinton ait aujourd'hui décidé de discuter avec Richard Mellon Scaife, en donnant une interview au Pittsburgh Tribune-review, c'est une autre histoire.

The man

Par Luc Serriere, Michigan

Né à Versailles et arrivé aux USA en 1961 après une excursion en Algérie due à la bienveillance de l’armée française, j'ai fait presque toute ma carrière en Californie, dans la bureautique d’abord, les PC et les réseaux ensuite. Je suis maintenant retraité au nord du Michigan (Traverse City) d’où mon épouse est originaire. J'ai toujours voté à droite, pensant que dans un pays comme celui-ci les services sociaux, y compris la médecine, ne devraient être qu’un filet de sécurité et non pas un hamac.

Mais pour ces prochaines élections, la situation est différente: Le parti républicain va présenter McCain. Et avant tout, il est vieux, plus vieux même que Reagan ne l’était à sa première élection. En plus il n’a pas la présence d’un grand communicateur.  Bien sûr le gouvernement, selon la plateforme du parti, est toujours le problème, mais après huit ans de Bush, de déficits successifs, de dévaluation du dollar, de crise de la propriété foncière, de hausse des prix, les électeurs vont aller voir ailleurs. Et puis McCain veut continuer nos échecs en Irak…

Alors, mon choix sera démocrate. Les deux encore en course ont des idées bien similaires. Des idées de gauche du point de vue américain, avec le gouvernement jouant un plus grand rôle dans les soins médicaux. Mais les deux personnalités sont bien différentes: Pour son malheur, Madame Clinton est trop connue. Ses colères légendaires, avec lampadaires volants, les gains d’argent soudain (Plus de $100,000.00 pour un investissement de 24 heures), sa façon de pousser ce qu’elle veut (son idée de réforme médicale dans les années 90), ses scandales (la mise à la porte de tout le service de voyage de la Maison Blanche, juste pour mettre une de ses amies à la place, ou bien la mort non expliquée de John Foster, probablement son amant, ou encore les trouvailles de certain de ses papiers manquants dans un bureau de la Maison Blanche). Elle est très ambitieuse, certains disent trop, et sans doute très intelligente, mais elle fait peur!

Alors il reste Obama. Il a eu à répondre à plusieurs situations potentiellement embarrassantes et il l’a toujours fait avec beaucoup de flaire et de tact. Bien qu’il soit beaucoup trop «social» à mon goût, il est jeune, plein d’allant et plein d’idées. On croirait entendre Jack Kennedy des années 60.

Les USA ont besoin, en ce moment, de quelqu’un qui va nous remonter le moral et nous donner de nouveaux espoirs. Je crois qu’il est cette personne: «The man» comme on dit ici.

Les prochaines élections primaires en Pennsylvanie pourraient être le dernier clou dans le cercueil (politique) de Madame Clinton. Mais j’en doute car elle est très populaire dans les classes ouvrières, la majorité dans cet état. Alors il va falloir attendre la convention démocrate pour savoir le nom du candidat. Par une entourloupette du système US, ni le Michigan (mon état), ni la Floride ne seront représentés à cette convention.

Diversion

Scandaleux ! Honteux ! Les candidats se sont engagés dans une tentative désespérée pour nous détourner, nous spectateurs mondiaux de cet époustouflant soap-opera meets Star Wars qui tient lieu d'amuse-gueule aux élections de novembre, de ce qui nous préoccupe vraiment depuis des mois. Je veux bien sûr parler de la vidéo You Tube montrant la descente en hélicoptère héroïque d'Hillary Clinton en Bosnie sous les feux nourris de snipers embusqués, l'Operation Chaos lancé par l'animateur radio Rush Limbaugh pour faire voter un maximum de républicains dans les primaires démocrates, un ticket possible McCain/Mitt Romney (uh-oh) ou Bloomberg/Obama (uh-oh bis) ou encore le tardif lâchage en rase campagne du révérend Wright par ce dernier lors de son interview dans The View sur ABC. Hé bien, dans cette optique de diversion, nos candidats se sont enhardis à nous parler cette semaine d'économie.

Music maestro

Une campagne présidentielle sans quelques hymnes –officiels ou non— et leurs parodies, ça serait quand même moins sympa. Chez nous, on avait eu droit à l’immense Nicolas et Ségolène des Musclés, ou encore au mémorable Mon pays la France («trop de taxes, trop d’impôts, trop de complots oho») ; aux USA, on change de division, avec will.i.am (des Black Eyed Peas) qui s’y colle.

 

Le carton, c’est pour Obama. Son fameux «Yes we can» a donc inspiré will.i.am, qui devait s’ennuyer, Fergie, une grande fille qui ne pleure pas, étant partie faire un break en solo. Le résultat: une vidéo super efficace avec un bon flow et des discours samplés, plus la présence de quelques guest stars comme Scarlett Johansson.

 

 

L’autre slogan d’Obama, «Fired up, ready to go» a également été transformé en une version bluesy/gospell, pendant que la célèbre Obama girl cartonnait il y a un an avec son très r'n'b "I got a crush on Obama".

BREVES DE CAMPAGNE : Le filon inépuisable du révérend Wright

Vendredi 21 mars

Le débat avance. Entre l'annonce qu'un aide de campagne (de bas niveau, nous dit le blog du New York Times) de la campagne de John McCain a été suspendu pour avoir fait circuler une vidéo bien furibarde –associant prêches du révérend Wright, Malcolm X et images d'Obama bafouillant sur fond de Fight the power de Public enemy) et Géraldine Ferraro qui enfonce le clou, le staff de campagne d'Obama voulait répliquer. Il a frappé fort. La révélation en photos : Bill Clinton connaissait lui-même le révérend Wright !  Il l'a invité à la Maison Blanche en 1998 avec une centaine d'autres pasteurs ! Scandale ! Il est lui aussi mouillé avec le pasteur radical dont notre candidat rame pour se distancer. Pfff… Les gars, franchement, va falloir faire mieux pour déstabiliser Hillary Clinton. Un bel exemple de spin raté

Du côté des vrais mauvaises nouvelles pour Clinton, Bill Richardson, l'ancien candidat démocrate, gouverneur du Nouveau-Mexique, superdélégué et voix écouté dans la communauté hispanique, soutient Obama, justement.

Tout comme en Floride, il n'y aura pas de revote des primaires du Michigan.

Il y a des petits malins au département d'Etat qui ont été un peu trop curieux avec le passseport de Barack Obama…

Gilles Bouvaist, à New York

Five years

Cinq ans que la guerre a commencé et George W. Bush ressemble de plus en plus à un somnambule traversant la chambre noire de sa fin de règne en sifflotant. Qu'il évoque la crise économique ou la guerre, il a un drôle d'air optimiste, limite insouciant, qui résume assez bien sa présidence. Un peu comme Dick Cheney qui, lorsqu'on lui fait remarquer que les deux-tiers des Américains pensent que cette guerre ne valait pas la peine d'être combattue, réplique que l'on ne va pas s'en faire pour quelques sondages…

De ce drôle d'anniversaire funèbre, le New York Times fait ressurgir dans le blog de ses correspondants en Irak, Bagdad Bureau, des morceaux lugubres ou simplement significatifs.

Et George Packer, reporter au New Yorker, auteur d'un ouvrage sur son expérience en Irak et d'une pièce poignante sur le sort des Irakiens qui ont travaillé pour le compte des Américains, rappelle dans World Affairs à quel point la réalité de cette guerre reste insaisissable depuis les Etats-Unis: